Maternité: enceinte juste après un licenciement, la protection est possible

Publié le 10/09/2014

La Cour de cassation vient d’élargir le champ de la protection de la femme enceinte contre le licenciement. Elle l’étend à une femme qui apprend qu’elle est enceinte après avoir été licenciée. Le licenciement est annulé quand, dans un délai de 15 jours à compter de sa notification, l’intéressée informe son employeur de son état, et ce, quand bien même elle n’était pas encore enceinte au jour de la notification de la rupture du contrat. Cass. Soc. 02.07.14, n° 13-12496.

  • Rappel du cadre légal

Dès lors qu’il a connaissance de l’état de grossesse d’une salariée, l’employeur ne peut pas la licencier, sauf cas particuliers (à lire « Maternité : la protection contre le licenciement peut-elle être prolongée ? » ). Il peut toutefois arriver que l’employeur ne sache pas, au moment où il la licencie, que la salariée est enceinte. Dans cette hypothèse, cette dernière doit envoyer à son employeur, dans un délai de 15 jours à compter de la notification du licenciement, un certificat médical attestant de son état. Le licenciement est ainsi annulé et l’employeur doit la réintégrer dans les plus brefs délais (art L. 1225-5 c.trav.).

Il convient de rappeler que si le Code du travail organise la protection de la femme enceinte c’est toutefois à la condition que celle-ci souhaite en bénéficier : la salariée n’est pas obligée de déclarer sa grossesse à son employeur.

 

  • Licenciée mais pas encore enceinte

Dans l’affaire présente, la salariée s’est vue notifier son licenciement le 15 octobre 2009. Le 30 octobre 2009 elle adresse à son employeur un certificat médical attestant de sa grossesse afin de demander l’annulation de son licenciement.

La particularité de l’arrêt réside dans les mentions portées au certificat et selon lesquelles, la grossesse aurait « débuté depuis 10 à 15 jours environ », soit au plus tôt le 16 octobre 2009. Autrement dit, la salariée n’était pas encore enceinte au jour où son licenciement lui a été notifié.

C’est précisément pour cette raison que la Cour d’appel a rejeté la demande d’annulation du licenciement présentée par la salariée. Elle a en effet estimé que la protection contre la rupture du contrat supposait que la grossesse fut effective au jour du licenciement. Ce qui n’était pas le cas ici, la salariée (licenciée le 15 octobre 2009) serait tombée enceinte au plus tôt le 16 octobre 2009.

  • Les conditions de la nullité du licenciement

La Cour de cassation a pourtant censuré l’analyse de la Cour d’appel. En effet, la seule exigence imposée par le Code du travail pour faire annuler le licenciement est que dans un délai de 15 jours, à compter de sa notification, la salariée envoie à son employeur un certificat médical justifiant qu’elle est enceinte. Pourtant, à aucun moment la loi n’exige que la grossesse soit effective au jour de la notification du licenciement. La salariée est donc protégée même si elle tombe enceinte dans les 15 jours suivant son licenciement, à condition d’en informer son employeur dans ce même délai. Cette information « en temps et en heure » constitue donc l’unique obligation de la salariée et l’unique condition à la demande d’annulation du licenciement. La Haute Cour considère qu’en exigeant que la grossesse soit réelle au jour du licenciement, la Cour d’appel a ainsi ajouté « à la loi une condition qu’elle ne prévoit pas ».

Le délai de 15 jours court à compter du jour où la notification du licenciement a été effectivement portée à la connaissance de la salariée. Le certificat médical doit être envoyé par lettre recommandée avec avis de réception. L’information de l’employeur est réputée effective au jour de l’expédition du certificat médical, quelle que soit la date de sa réception par celui-ci (R1225-2 c.trav.)

  • Une protection étendue de la femme enceinte

Par cet arrêt, la haute Cour vient préciser et renforcer la protection des femmes enceintes. En appliquant à la lettre le Code du travail (exigeant seulement l’envoi du certificat dans le délai), elle étend par la même occasion ce champ de protection.

L’arrêt vient ainsi s’inscrire dans la continuité d’une jurisprudence qui tend à interpréter largement le champ des garanties de la femme enceinte.