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Détachement : de nouvelles dispositions applicables

Publié le 09/07/2019

Pas moins de 15 articles de la loi pour la liberté de choisir son avenir professionnel étaient consacrés au détachement. A compter du 1er juillet 2019, l’ensemble de ces dispositions visant à lutter contre les fraudes au détachement et au travail illégal sont applicables. Décret n°2019-555 et arrêté du 4 juin 2019 (1).

Le cadre du détachement est ainsi renforcé, mais aussi aménagé. Au-delà des dispositions visant une nouvelle fois à renforcer le cadre du détachement, certaines dispositions facilitent des détachements pour lesquels, selon le législateur, le risque de fraude est moindre. Les contours de ces allégements viennent d’être précisés par un décret et un arrêté du 4 juin 2019.

  • Détachement de courte durée ou pour des évènements ponctuels

Pour rappel, les entreprises intervenant pour des prestations et des opérations de courte durée, ou dans le cadre d’évènements ponctuels, peuvent se voir dispensées des démarches administratives suivantes (2) :

- la déclaration de détachement,

- la désignation du représentant en France.

 

A noter que cet allégement ne peut pas s’appliquer aux entreprises de travail temporaire ni aux agences de mannequins.

 

L’arrêté du 4 juin 2019 fixe la liste des activités concernées et la durée maximale d’activité en France, sur une période de référence pour chaque activité identifiée.

On note que sont concernés certains artistes, sportifs, arbitres qui ne dépassent pas les 90 jours sur 12 mois consécutifs.  De même : les apprentis en mobilité temporaire en France ou les colloques, séminaires, manifestations scientifiques et activités d’enseignement dont la durée ne dépasse pas 12 mois consécutifs.

Rappelons que d’ici le 30 juillet 2020, suite à la révision de la directive sur le détachement, la durée maximale de détachement ne pourra excéder 12 mois (voire 18 mois).

Pour ces derniers cas, il ne s’agit donc pas véritablement d’une limite de durée...

Le décret adapte quant à lui l’obligation de présenter à l’inspection du travail les documents traduits en français en cas de contrôle : un délai de 15 jours est accordé à l’employeur établi hors de France pour produire les documents relatifs au détachement des travailleurs sur le territoire français (3).

 La CFDT avait fait savoir au Gouvernement que ces dispenses ne devaient concerner que certaines prestations et seulement des détachements de courte durée, ce qui a été repris dans la loi.

  • En cas de détachement pour compte propre

 Le détachement pour son compte propre consiste, pour une entreprise étrangère, à détacher un salarié en France sans qu’il n’existe de contrat avec un client en France (c’est une auto-prestation).
Par exemple : un journaliste allemand qui est détaché en France pour couvrir un évènement sportif. C’est le 4è cas supplémentaire de détachement prévu par le droit français.
La France est actuellement le seul pays à prévoir ce cas supplémentaire, et donc à demander une déclaration préalable de détachement.

Le décret précise que les documents devront être produits sans délai à l’inspection du travail en cas de contrôle, à l’exception notamment :

-       du document attestant d’un examen médical dans le pays d’origine,

-       des documents attestant de l’exercice d’une activité réelle et substantielle de cet employeur dans son pays d’établissement.

Un délai de production de 15 jours maximum est alors autorisé.

  • Un nouveau mode de désignation du représentant en France

Le décret précise que la désignation du représentant de l’entreprise sur le territoire national, chargé d’assurer la liaison avec les agents de contrôle, se fera désormais sur la déclaration de détachement (4). Cette désignation couvrira l’intégralité de la période pendant laquelle les salariés sont détachés en France. Elle n’aura donc plus à faire l’objet d’un courrier à part.

Pour la CFDT, cette mesure permettra sans nul doute de veiller au respect de cette obligation.

Notons que le décret modifie également les éléments devant figurer dans la déclaration préalable de détachement (5).

  • Renforcement des moyens de lutte contre les fraudes au détachement et contre le travail illégal

Le décret met en œuvre les dispositions relatives aux amendes administratives.

Par exemple, en cas de manquement observé lors d’un contrôle du paiement des amendes administratives, il est ajouté une possible pénalité d’interdiction de prestation ne pouvant excéder 2 mois (6). Le Direccte peut y mettre fin au vu des justificatifs de régularisation fournis par le représentant de l’employeur, par le maître d’ouvrage ou le donneur d’ordre cocontractant du prestataire (7).

Notons que dans la loi, il est précisé que cette interdiction de prestation est de 2 mois maximum, renouvelables. Or, le décret ne dit rien sur la possibilité de renouveler ce délai (8).

Par ailleurs, le contrôle est renforcé dans le secteur du bâtiment. Par exemple, l’obligation de détenir la carte d’identification professionnelle est élargie (9).

Enfin, le décret précise la compétence de l’inspection du travail et les modalités des demandes de communication de documents et d’informations qui en émanent (10).

La Commission nationale de lutte contre le travail illégal (CNLTI), à laquelle participe la CFDT, s’est réunie ce 8 juillet sous la présidence de la ministre du Travail.  Le Gouvernement a présenté un bilan du Plan 2016-2018 et le nouveau Plan 2019-2021 (documents accessibles prochainement en principe sur le site du ministère).

La CFDT partage globalement les objectifs cités, et particulièrement celui prévoyant une véritable responsabilité solidaire du maître d’ouvrage et du donneur d’ordre. Elle suivra avec vigilance la mise en œuvre de ce plan, attentive aux moyens, mais surtout aux résultats effectifs obtenus...

(1) Décret n°2019-555 du 04.06.19 portant diverses dispositions relatives au détachement de travailleurs et au renforcement de la lutte contre le travail illégal. Arrêté du 04.06.19 établissant la liste des activités mentionnées à l’art. L.1262-6 C.trav.

(2) Art. L.1262-6 C.trav.

(3) Art. R.1263-1 C. trav.

(4) Art. R.1263-2-1 C.trav.

(5) Art. R.1263-3 C.trav.

(6) Art. R.1263-11-3 et R.1263-11-4 C.trav.

(7) Art. R.1263-11-6 C.trav.

(8) Art. L.1263-4-2 C.trav.

(9) Art. R.8291-1 C.trav.

(10) Art. R.8113-3-2 et R.8113-3-3 C.trav.