Arrêt de travail : quand non-remise du formulaire rime avec complément de salaire

Publié le 07/07/2020

L’absence de remise du volet du formulaire d’arrêt de travail pour maladie ou accident à l’employeur empêche-t-il le maintien du complément salaire ? A l’occasion d’une affaire mettant en cause la convention collective des télécommunications, la Cour de cassation a répondu par la négative. Cass.soc. 24.06.20, n°18-23869, n°18-23870, n°18-23871.

Pour rappel, en cas d’arrêt de travail pour maladie ou accident justifié par un certificat médical, le salarié, qui a un an d’ancienneté dans l’entreprise, bénéficie d’indemnités journalières de la sécurité sociale (article L. 321-1 du code de la sécurité sociale) mais également d’un complément d’indemnisation (c’est à dire la garantie de maintien du complément de salaire) versé par l’employeur (article L. 1226-1 du code du travail) à condition :
- d’avoir justifié dans les 48 heures de cette incapacité de travail ;
- d’être pris en charge par la sécurité sociale ;
- d’être soigné sur le territoire français ou dans l’un des Etats membres de l’Union européenne ou un Etat de l’Espace économique européen.

  • Faits et procédure

Dans la présente affaire, trois salariés sont arrêtés pour maladie. N’ayant pas reçu le volet 3 du formulaire d’arrêt de travail signé par le médecin, leur employeur n’a pas versé le complément d’indemnisation à la sécurité sociale pourtant prévu par la convention collective nationale des télécommunications. Les salariés saisissent alors le Conseil de prud’hommes qui condamne l’employeur au versement de ces sommes à titre de rappel de salaire.

Contestant cette décision, l’employeur forme un pourvoi en cassation. Parmi ses arguments, il affirme respecter l’article 4.3.1 de la convention collective nationale des télécommunications du 26 avril 2000 qui prévoit qu’« après 6 mois d’ancienneté […] et en cas d’absence justifiée par l’incapacité résultant de la maladie ou d’un accident, professionnel ou non, dûment constaté par certificat médical […], l’intéressé bénéficie des compléments d’indemnisation à la sécurité sociale, à condition d’avoir justifié dans les 48 heures de cette incapacité et d’être pris en charge par la sécurité sociale et d’être soigné sur le territoire national ou dans l’un des pays de la Communauté économique européenne ».

Ainsi, pour l’employeur, le salarié n’a vocation à être pris en charge par la sécurité sociale qu’à la condition que cet arrêt de travail ait été déclaré à la CPAM par le biais du formulaire signé par son médecin et dont le volet 3 est remis à l’employeur.
Selon l’employeur, si le volet 3 du formulaire ne lui est pas remis, il n’est pas tenu de verser le complément de salaire.
Telle n’est pas l’interprétation de la Cour de cassation qui balaie l’argumentation de l’employeur et confirme la décision du Conseil de prud’hommes.

  • La non-remise du formulaire à l’employeur ne fait pas obstacle au maintien du complément de salaire

Pour la Cour de cassation, le bénéfice du complément d’indemnisation à la sécurité sociale prévu par la convention collective n’implique pas la nécessité pour le salarié absent de percevoir une prestation de la CPAM, mais simplement celle d’avoir la qualité d’assuré social. Or le fait de ne pas avoir remis le volet 3 à l’employeur ne lui fait pas perdre sa qualité d’assuré.

Par conséquent, l’absence de remise à l’employeur du formulaire réglementaire ne peut pas faire obstacle au maintien du salaire des salariés absents dans les conditions prévues par la convention collective.

Même si cette décision est favorable au salarié, cela ne doit cependant pas signifier que les salariés absents pour maladie ou accident sont dispensés de transmettre le volet 3 du formulaire à leur employeur. En effet, comme illustre bien cet arrêt, ce manquement pourrait être source de tensions et de conflits avec l’employeur. De plus, il est important de toujours bien vérifier les dispositions de la convention collective applicables en cas d’arrêt de travail.