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Maternité : l’augmentation légale de salaire ne peut être contournée

Publié le 07/03/2018

Au retour de son congé maternité, la salariée bénéficie d’un dispositif légal de rattrapage des augmentations de salaire intervenues pendant son congé. L’employeur ne peut y échapper en octroyant à la salariée une prime exceptionnelle et ce, même si elle l'a acceptée. Les dispositions encadrant ce dispositif sont d’ordre public. C’est ce que vient de préciser, pour la première fois, la Cour de cassation dans un arrêt publié. Cass.soc.14.02.18, n°16-25.323.

  • Rappel du dispositif légal de rattrapage salarial

Afin qu’une salariée, de retour de son  congé maternité, ne soit pas privée du bénéfice des augmentations salariales (générales et individuelles) accordées dans son entreprise pendant son absence, la loi du 23 mars 2006 relative à l’égalité salariale entre les femmes et les hommes a instauré un dispositif prévoyant la majoration du salaire au retour du congé maternité.

Plus précisément, l’article  L. 1225-26 du Code du travail dispose qu’à défaut d’accord de branche ou d’entreprise prévoyant des garanties au moins aussi favorables, la salariée de retour de congé maternité doit voir sa rémunération majorée :

-          des augmentations générales ;

-          mais aussi de la moyenne des augmentations individuelles perçues pendant la durée de ce congé par les salariés relevant de la même catégorie professionnelle ou à défaut, de la moyenne des augmentations individuelles dans l'entreprise.

Dans cet arrêt, pour la première fois, la Cour de cassation se prononce sur la mise en application de ce dispositif et son possible contournement.

  • Faits, procédure

A  son retour de congé maternité, une salariée se voit proposer, au lieu et place de l’augmentation de salaire de 2,2% accordée au personnel (en son absence), le versement d’une prime exceptionnelle de 400 euros. Ce qu’elle accepte dans un courriel adressé à son employeur. 

Un peu plus tard, la  salariée décide de saisir le juge prud’homal afin de bénéficier de l’augmentation de salaire à laquelle elle aurait dû avoir droit via le dispositif légal.

Les juges du fond ont débouté la salariée de sa demande, estimant que cette dernière avait renoncé en toute conscience au bénéfice du dispositif issu de la loi de 2006.

Un pourvoi est alors formé devant la Cour de cassation. La question posée est la suivante : un employeur peut il contourner le dispositif légal de rattrapage au retour d'un congé maternité au profit d'une prime exceptionnelle. Et ce, même si la salariée l'a accepté.

 

  • Dispositif d’ordre public, ne pouvant être contourné par l’employeur

Non, pour la Cour de cassation, qui censure le raisonnement des juges du fond.

La Haute Cour rappelle le dispositif prévu par le Code du travail et ajoute que ces dispositions sont d’ordre public. L’augmentation de salaire ne peut donc être remplacée par une prime exceptionnelle, peu importe que la salariée l’ait expressément acceptée ou non.

La Haute Cour précise également que les exigences du dispositif découlent de la directive du 5 juillet 2006 relative à la mise en œuvre du principe d’égalité des chances et de l’égalité de traitement entre les hommes et les femmes en matière d’emploi et de travail. L’article 15 de cette directive prévoit qu’ « une femme en congé maternité a le droit, au terme de ce congé, de retrouver son emploi ou un emploi équivalent à des conditions qui ne lui soient pas moins favorables et de bénéficier de toute amélioration des conditions de travail à laquelle elle aurait eu droit durant son absence ».

Cette solution très sensée s’explique par le fait que le dispositif légal vise à protéger les femmes parties en congé maternité, en empêchant tout impact de cette absence sur l’évolution de leur rémunération.

Enfin, il faut avoir à l’esprit que le fait de recevoir une prime exceptionnelle plutôt qu’une évolution salariale du même montant n’a pas les mêmes conséquences. Dans  le cas du versement d’une prime exceptionnelle, le salaire fixe n’évolue pas. C’est donc nettement moins avantageux pour la salariée partie en congé maternité.