Congés pour décès d’un enfant : des mesures enfin adoptées

Publié le 03/06/2020

« Proposer un véritable accompagnement et une sécurisation des parents confrontés à ce drame ». Tel était, pour la CFDT, l’enjeu de l’évolution de la législation liée à cet évènement tragique que constitue la perte d’un enfant. Près de 4 mois après l’annonce par le Gouvernement du lancement d’une concertation et après des débuts difficiles, la proposition de loi « visant à améliorer les droits des travailleurs et l’accompagnement des familles après le décès d’un enfant » a finalement été adoptée ce mardi 26 mai 2020. Reprenant ainsi en partie les propositions présentées par la CFDT lors des concertations. LOI n° 2020-692 du 8 juin 2020 visant à améliorer les droits des travailleurs et l'accompagnement des familles après le décès d'un enfant.

  • Un allongement du congé pour décès d’un enfant

Aujourd’hui, tout salarié qui perd un enfant, quel que soit son âge, bénéficie, au terme du Code du travail, d’un congé de 5 jours minimum(1), sachant que des accords collectifs peuvent bien évidemment prévoir un nombre de jours supérieur. Pendant ce congé, le salarié bénéficie d'un maintien de salaire.

A compter du 1er juillet 2020, ce congé passe à 7 jours ouvrés lorsque(2) :

  • l’enfant est âgé de moins de 25 ans,
  • quel que soit son âge, si l’enfant décédé était lui-même parent
  • ou en cas de décès d’une personne âgée de moins de 25 ans à sa charge effective et permanente.

A noter : le congé reste d’une durée de 5 jours dans l’hypothèse où l’enfant a plus de 25 ans.

Cette durée minimale s’applique en tout état de cause y compris lorsqu’elle est prévue par un accord collectif.

  • La création d’un « congé de deuil »

Pour quels salariés ? Au-delà du congé pour décès, le texte crée un congé de deuil de 8 jours pour tout salarié, et sur justification, en cas de décès d’un enfant âgé de moins de 25 ans ou d’une personne âgée de moins de 25 ans à sa charge effective et permanente(3).

Ce congé peut être fractionné, dans des conditions qui seront fixées par décret. Il peut être pris dans un délai d’un an à compter du décès de l’enfant. Pour en bénéficier, le salarié doit en informer l’employeur au moins 24h avant le début de chaque période d’absence.

Quelle prise en charge ? La prise de ce congé ne doit pas entraîner pour le salarié de perte de rémunération et ce temps est assimilé à du temps de travail effectif pour le calcul du droit à congés payés(4).

Plus précisément, dès lors qu’il cesse toute activité salariée (ou assimilée), le salarié en congé de deuil peut bénéficier des indemnités journalières versées par la Sécurité sociale. L’employeur qui maintient le salaire est subrogé de plein droit dans les droits du salarié à l’indemnité journalière(5).

Par ailleurs, cette période de deuil est prise en compte pour le calcul des primes d’intéressement(6) et de participation(7).

A partir de quand ? Ce nouveau congé s’applique aux décès intervenus à compter du 1er juillet 2020.

Et les travailleurs indépendants ?

Ils sont aussi visés par le texte : en cas de décès d’un enfant de moins de 25 ans ou d’une personne de moins de 25 ans dont ils ont la charge effective et permanente et dans un délai d’un à compter de cette date, l’assuré bénéficie d’indemnités journalières pendant une durée de 15 jours. Ces indemnités peuvent être fractionnées dans des conditions fixées par décret (à paraître), à condition qu’ils cessent leur activité professionnelle(9). Idem pour les personnes non salariées des professions agricoles(10).

  • Une extension de la possibilité de donner des jours de repos

Aujourd’hui, le Code du travail prévoit la possibilité pour un salarié, avec l’accord de son employeur, de renoncer anonymement et sans contrepartie à toute ou partie de ses jours de repos non pris (affectés ou non sur un CET), au profit d’un autre salarié de l’entreprise qui assume la charge d’un enfant de moins de 25 ans atteint d’une maladie, d’un handicap ou victime d’un accident d’une particulière gravité rendant indispensables une présence soutenue et des soins contraignants(11). 

Le texte étend ce mécanisme aux salariés dont l’enfant de moins de 25 ans est décédé ou en cas de décès de la personne de moins de 25 ans dont il a la charge effective et permanente. Cette renonciation peut intervenir au cours de l’année suivant la date du décès(12).

  • Un nouveau cas de protection contre le licenciement en cas de perte d’un enfant

Enfin, un salarié qui a perdu son enfant de moins de 25 ans ou la personne âgée de moins 25 ans dont il a la charge effective et permanente, bénéficie d’une protection contre le licenciement pendant les 13 semaines qui suivent le décès.

Attention toutefois, car l’employeur reste en revanche libre de rompre le contrat de travail s’il justifie d’une faute grave du salarié ou encore de l’impossibilité de maintenir le contrat pour un motif étranger au décès de l’enfant(13).

  • La suppression du délai de carence en cas d’arrêt de travail

Dans les 13 semaines suivant le décès de son enfant de moins de 25 ans ou de la personne de moins de 25 ans dont il a la charge, le salarié qui se trouve en arrêt de travail ne se verra pas soumis au délai de carence prévu pour le versement des indemnités journalières par la Sécurité sociale(14).

A noter : la suppression du délai de carence ne vaut que pour le 1er arrêt de travail pris dans ce délai. A l’inverse, il s’appliquera pour les arrêts suivants.

A partir de quand ? Cette mesure s’applique aux décès intervenus à compter du 1er juillet 2020.

A noter : Au-delà de ces mesures, d’autres dispositions concernent plus spécifiquement la sécurité sociale telles que le maintien de certaines prestations familiales pendant un certain temps, ou encore le maintien de la prise en compte de l’enfant décédé pour le calcul des droits au RSA, le versement d’une allocation forfaitaire pour chaque enfant dont le décès intervient jusqu’à un âge limite, et enfin, l’Etat autorise, à titre expérimental, le financement de la prise en charge de la souffrance psychique.

L’ensemble de ces mesures sont bien évidemment très positives, mais l’enjeu va au-delà. Ce droit à une absence rémunérée doit nécessairement s’accompagner d’une prise en compte dans l’organisation du travail et la gestion de la charge de travail du travailleur en son absence.

 

(1) Art L.3142-1 et s C.trav.

(2) Art L.3142-4 mod. C.trav.

(3) Art L.3142-1-1 nouveau. C.trav.

(4) Art L.3142-2 mod. C.trav.

(5) Art L.331-9 nouv. CSS.

(6) Art L.3314-5 mod. C.trav.

(7) Art L.3324-6 mod.C.trav.

(8) Art 21 mod. de la loi n°83-634 du 13.07.83 portant droits et obligations des fonctionnaires.

(9) Art L.623-1 mod. CSS.

(10) Art L.732-12-3 nouv. Code rural et de la pêche maritime.

(12) Art L.1225-65-1 mod. C.trav.

(13) Art L.1225-4-2 nouv. C.trav.

(14) Art L.323-1-1 nouv. CSS.